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Key to the Art of Letters

Lane, Archibald

DomaineGrammaires des langues européennes modernes
SecteurGrammaires anglaises [3610]
Auteur(s)

Lane, Archibald

Datation: Mort entre 1700 et 1705

On ne sait guère du grammairien anglais A. Lane que ce qui figure en frontispice de son ouvrage Key to the Art of Letters (1700): c'était un pédagogue qui était "M.A., late Master of the Free-School of Leominster in Herefordshire, now Teacher of a private School at Mile-End-Green near Stepney". Il est également auteur d'une grammaire latine publiée 5 ans plus tôt (A Rational and Speedy Method of Attaining to the Latin Tongue in two Parts. The first containing such Precepts as are common to all Languages. The second what is more peculiar to the Latin Tongue…, 1695), ouvrage dont la 1re partie, à prétentions universelles, présente déjà l'essentiel de ce qui devait devenir sa grammaire de l'anglais. Voir Michael 1975, p. 569.

Titre de l'ouvrageA Key to the Art of Letters: or, English a Learned Language, Full of Art, Elegancy and Variety. Being an Essay to enable both Foreigners, and the English Youth of either Sex, to speak and write the English Tongue well and learnedly, according to the exactest Rules of Grammar. After which they may attain to Latin, French, or any other Forein [sic] Language in a short time, with very little trouble to themselves or their Teachers. With a Preface shewing the Necessity of a Vernacular Grammar
Titre traduitClef pour l'art des lettres: ou, l'anglais, langue cultivée, possédant vertus artistiques, élégance et variété. Essai visant à permettre à la fois aux étrangers et aux jeunes Anglais des deux sexes de parler et écrire une langue anglaise correcte et cultivée, selon les règles de grammaire les plus exactes. Après quoi ils pourront accéder au latin, au français ou à toute autre langue étrangère en très peu de temps, sans grande peine pour eux-mêmes ni pour leur professeur. Avec une Préface qui démontre la nécessité d'une grammaire du vernaculaire
Titre courtKey to the Art of Letters
Remarques sur le titre
Période|18e s.|
Type de l'ouvrageGrammaire scolaire qui se veut fondée sur des principes de grammaire universelle, mais est à vocation essentiellement utilitaire.
Type indexéGrammaire pratique | Grammaire didactique
Édition originale1700, Londres, A. & J. Churchil, et J. Wild.
Édition utiliséeReproduction de la Scolar Press, fac-similé de la 1re éd. de 1700 (Londres, A. & J. Churchil & J. Wild).
VolumétrieIn-8°; 148 pages (xx + [4] + 112 + [12 pages blanches]). Environ 1400 signes par page.
Nombre de signes190000
Reproduction moderneReproduction en fac-similé de l'exemplaire de la 1re édition conservé à la British Library (cote 626. a. 10), Menston, The Scolar Press Ltd., 1969 (E.L. n° 171).
Diffusion2 rééditions seulement: une édition non numérotée en 1705 (Londres, Ralph Smith & William Hawes), et une "seconde édition" en 1706 (Londres, John Sprint). Voir Alston, vol. 1, 1965, p. 12, n° 36-38.
Langues ciblesAnglais
MétalangueAnglais
Langue des exemples
Sommaire de l'ouvragePage-titre. Recommandation de 4 pédagogues de Londres (p. ii). Dédicace au Duc de Glocester [sic] (iii-vi). Préface adressée au lecteur cultivé ("to the learned reader") dans laquelle Lane justifie sa démarche, se livre à une apologie de la grammaire du vernaculaire, la définit, et situe la place optimum à lui accorder dans le cursus. Poème de J. Ovington à la gloire de Lane (4 p.). Alors commence "a key to the art of letters" proprement dit, qui, après une courte définition de la grammaire (p. 1), est organisé en séquences de questions/réponses sur 4 thèmes qui constituent pour Lane les 4 parties de la grammaire: les lettres (2-8), les syllabes (8-18) (auxquelles sont associés le "e servile" et l'accent), les mots (18-74) (dont le substantif, le "s servile", le nombre, la déclinaison du nom, et les genres du nom (21-30), l'adjectif et la comparaison (31-37), le verbe, la conjugaison du verbe, les modes, les temps, les participes et le verbe "substantif" ou "copulatif" am (37-55), les particules, l'adverbe, la préposition, la conjonction, les abréviations et les interjections (56-60), les mots dérivés, substantifs dérivés (indiquant l'actant, l'action, le métier…), adjectifs dérivés dont l'adjectif possessif entre autres dérivés (de matière, de plénitude ou vide, de ressemblance, diminutifs et adjectifs ordinaux), verbes dérivés, adverbes dérivés et particules préfixées "inséparables" (61-74); et enfin la phrase (74-104), qui traite des relations des mots entre eux dans la phrase simple (74-90), et aussi des phrases composées (les relatives, les copulatives, les déclaratives et finales, les "continuatives", les comparatives, et les interrogatives et disjonctives) (90-103) pour terminer par la période (104). A tout cela, Lane ajoute quelques pages sur quelques tropes (transposition, ellipse, substitution, zeugma, solécisme et pléonasme) (104-108), sur l'ordre naturel des mots et sur la ponctuation (108-112).
Objectif de l'auteurLa préface montre un grammairien soucieux de se détacher du système latin pour élaborer, à partir de l'observation de la nature, un système raisonné spécifique à l'anglais et susceptible de servir de fondement à l'éducation de la jeunesse, tout d'abord pour une formation en anglais, puis, par le jeu de concepts transférables, pour l'apprentissage des autres langues. La visée est nettement pédagogique: la référence à la logique et le dialogue quasi-socratique sont justifiés non par des arguments culturels, mais par l'efficacité attendue d'une méthode qui veut répondre à la curiosité des jeunes et prévenir leur ennui en suscitant leur participation active, le tout accompagné d'une recherche de simplicité et de concision destinée à faciliter l'accès de cet enseignement à l'élève.
Intérêt généralPremière remise en question radicale de la prééminence du latin dans le système éducatif anglais et de la latinisation de la grammaire anglaise avec aménagement en conséquence de l'enseignement de l'anglais à travers lequel Lane semble être le premier à vouloir faire découvrir les principes d'une grammaire universelle (Michael 1975, p. 498-499).
Parties du discoursLe traitement des parties du discours est novateur. Cette rupture est justifiée en termes philosophiques. Lane veut voir dans le langage un reflet du réel: ses 4 parties du discours sont le reflet des 4 classes de choses signifiables par les mots: le substantif (qui inclut les pronoms de 1re et 2e personne) exprime une "chose", l'adjectif (qui inclut les pronoms de 3e personne et les articles) exprime la "manière d'une chose", le verbe (qui inclut le participe) exprime l'"action d'une chose" et la particule (qui réunit l'adverbe, la conjonction et la préposition, mais dont l'interjection semble exclue) exprime la "manière d'une action".
Innovations term.Elles concernent essentiellement la syntaxe, dans laquelle sont introduites des notions opératoires telles que l'ordre des mots (natural or grammatical order, transposition), la réduction de phrases complexes (contraction) ou la nominalisation de phrases qui aboutit à la constitution d'aggregate substantives; on voit aussi apparaître des épithètes qui contribuent à la description des valeurs (final par exemple dans final sentences). A part cela on note quelques vernacularisations de la métalangue (doer se substitue à agent et s'oppose à patient, foregoing substantive alterne avec antecedent…) et quelques emprunts explicites au vocabulaire de la logique (subject, object, predicate). Dans la partie morphologique, on note aussi quelques formulations nouvelles: S servile (pour isoler la terminaison du pluriel, de la 3e personne du singulier des verbes et du génitif), verbs of nature (= verbes impersonnels), accomodate (= agree), verbal adjectives ou verbal nouns, participles with an active power… Ces changements n'ont, du moins en apparence, rien d'abrupt: terminologie ancienne et terminologie nouvelle coexistent souvent ("the accusative of the objet", "the accusative of some preposition supprest", "apposite accusative": voir Blois 1975), au point qu'on peut accuser Lane de conservatisme si on ne perçoit pas qu'à travers ces associations de termes empruntés à la tradition des descriptions morphologique et logique, c'est en fait à la fonction syntaxique qu'il est fait référence. Lane fait un premier pas vers ce concept de fonction qui est appelé à se développer considérablement au 18e siècle, après des progrès décisifs dans la grammaire latine de Clarke (1733).
Corpus illustratif
Indications compl.Traitement des parties de la grammaire en rupture avec la tradition gréco-latine transmise par Lily: lettres, syllabes, mots et phrases se substituent à orthographe , étymologie, syntaxe et prosodie. Cette présentation plus accessible de la grammaire, que l'on trouvait déjà dans quelques manuels de latin (Michael 1970, p. 186) mais qui fait ici sa première apparition dans la grammaire anglaise, semble correspondre au souci de Lane de promouvoir une approche de la grammaire par le vernaculaire.
Influence subiePas de source spécifique. Lane ne se réclame d'aucune influence, mais est-il vraiment original pour autant? Sa répartition (qui rappelle celle de Gill 1619) est fondée sur la distinction fondamentale entre le nom et le verbe qui caractérise la tradition logique issue d'Aristote. La séparation de l'adjectif et du substantif était, elle aussi, déjà dans l'air du temps, du moins chez les grammairiens (et pas seulement de l'anglais) soucieux de découvrir une dimension universelle au langage: cf. la grammaire de Port-Royal 1660, mais aussi Lewis 1670, Lane 1695, l'anonyme True Method of Learning the Latin Tongue by the English 1696… On note aussi, de temps en temps, des réminiscences de Wallis 1653 (notice 3606) et Cooper 1685 (notice 3608): ex. mention de sex distinguishing words, allusions à la futurity, désignation des cas du nom par le mot states, importance accordé à la description des valeurs. Mais par ailleurs, Lane paraît toujours très inféodé à la théorie des signes de Lily (notice 3601). Enfin, Padley (1985, p. 145-149) suggère que Lane, tout comme les Messieurs de Port-Royal (1660), peut avoir été soumis à l'influence de Comenius: il rapproche leurs démarches, à visée à la fois universelle et rationnelle, tout en mettant en évidence la différence – essentielle – que l'on peut noter entre l'approche empirique de Lane, qui repose sur la représentation par le signe de la réalité sensible, et l'approche beaucoup plus mentaliste d'Arnauld et Lancelot pour lesquels le signe ne représente que des opérations de l'esprit. Voir aussi Poldauf 1948, p. 92-93.
Influence exercéeLes 4 parties de la grammaire que propose Lane séduisent par leur simplicité; elles sont reprises dans 29 grammaires (voir Michael 1970, p. 186). Et ses 4 parties du discours se retrouvent dans 36 ouvrages, mais seulement 11 d'entre eux conservent la terminologie relativement traditionnelle de Lane: les 25 autres ouvrages qui adoptent cette classification quadripartite l'accompagnent d'une réforme de la métalangue plus radicale, inspirée de la Grammaire générale et raisonnée de Port-Royal (Arnauld & Lancelot 1660), substituant name à substantive, affirmation à verb, quality à adjective, et même parfois manner à particle (voir Michael 1970, p. 263-275 et 507-514).
Renvois bibliographiquesBlois A. 1975; Comenius J. A. 1664; Göbels A. 1999; Michael I. 1970; Padley G. A. 1985; Poldauf I. 1948; Walmsley J. 1999
Rédacteur

Le Prieult, Henri · Verrac, Monique

Création ou mise à jour2000