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La pensée et la langue

Brunot, Ferdinand

DomaineGrammaires françaises, remarques et traités sur la langue française
SecteurGrammaires françaises du 20e s. [2610]
Auteur(s)

Brunot, Ferdinand

Forme complète: Brunot, Ferdinand Eugène

Datation: 1860-1938

Grammairien français, né à Saint-Dié, mort à Paris, républicain, esprit libre. Entré à l'E.N.S. de la rue d'Ulm en 1879, il est agrégé de grammaire (1882), professeur à Bar-le-Duc, maître de conférences à Lyon (1883), docteur ès Lettres (1891) avec La Doctrine de Malherbe d'après son commentaire sur Desportes, puis maître de conférences à la Sorbonne; titulaire en 1900 de la chaire d'histoire de la langue française qu'il occupe jusqu'en 1934; professeur à l'E.N.S. d'Ulm et de Sèvres; doyen de la Faculté des Lettres de Paris de 1919 à 1928; membre de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (1925). Auteur d'une Grammaire historique en 1887; de La Pensée et la langue (1922); de l'Histoire de la langue française (1905-1938) en 11 tomes. Les tomes X et XI sont posthumes (1939-1979). L'entreprise a été poursuivie par Ch. Bruneau (tomes XII et XIII, 1948-1972). F. Brunot a vivement critiqué la Grammaire de l'Académie française dans les Observations sur la Grammaire de l'Académie française (1932). Adversaire d'une grammaire française latinisée; artisan avec L. Sudre du dépoussiérage de la terminologie grammaticale; partisan d'une réforme de l'orthographe.

Titre de l'ouvrageLa pensée et la langue, Méthode, principes et plan d'une théorie nouvelle du langage appliquée au français. Dédiée à "ma chère Ecole de Sèvres pour qui cette méthode a été créée et à l'Académie royale de Langue et Littérature françaises de Belgique".
Titre traduit
Titre courtLa pensée et la langue
Remarques sur le titre
Période|20e s.|
Type de l'ouvrageGrammaire théorique à visée explicitement pédagogique; Brunot prétend avoir découvert une méthode originale.
Type indexéGrammaire idéologique
Édition originale1922, Lille, A. Taffin-Lefort, et Paris, Masson, in-8°, XXXVI + 956 p.
Édition utiliséeTroisième édition revue, 1953, Masson et Cie, Paris.
VolumétrieFormat: gr. in-8°, XXXVI + 983 pages, 3080 caractères par page.
Nombre de signes3000000
Reproduction moderneTroisième édition revue, 1953, Paris, Masson et Cie.
DiffusionUne seconde éd. en 1927, et une "première" troisième éd., revue, en 1936, toutes les deux à Lille, A. Taffin-Lefort, et Paris, Masson. Ce gros ouvrage est le résultat d'une vie d'enseignement. Les principes en ont été exposés dans un cours public de Sorbonne, en 1907-1908, publié par N. Bony sous le titre de L'enseignement de la langue française, ce qu'il est, ce qu'il devrait être dans l'enseignement primaire, Paris, Colin, 1909; et ils ont été mis en œuvre dans trois livres de Méthodes, 1905-1911, Paris, Colin, destinés à l'enseignement primaire. Voir notice 2606.
Langues ciblesFrançais
MétalangueFrançais
Langue des exemplesLes exemples, français, sont littéraires, des divers siècles de la tradition ou inventés.
Sommaire de l'ouvrageEtant de type idéologique, cette grammaire repose sur un classement raisonné de notions; néanmoins le déroulement recouvre plus ou moins les plans traditionnels, fondés sur la morphologie et la syntaxe. Partie I (p. 39-199): les êtres et les choses (sexe, nombre, détermination, représentation). Partie II (p. 203-406): le sujet et les actions, les objets. Partie III (p. 409-573): les circonstances et les modalités: les lieux et les temps; jugements, sentiments et volontés. Partie IV (p. 577-694): la caractérisation (épithètes, adverbes, etc.). Partie V (p. 697-898): les relations: les conjonctions et les constructions qu'elles engagent.
Objectif de l'auteurF. Brunot vise à renouveler l'approche du français et, par là, l'enseignement du français.
Intérêt généralConfusément, F. Brunot se situe dans ce mouvement des linguistes de l'Entre-deux-guerres qui tente de dépasser la fragmentation du positivisme antérieur à 1914 en construisant des machines importantes, assez souples pour se modeler sur le mouvement de la vie; l'utilisateur possédera, grâce à la langue ainsi présentée, des modes d'action. Peu formé en logique de la langue, Brunot retrouve les ensembles idéologiques du 18e s. que son maître Ch. Thurot faisait admirer aux jeunes normaliens. La Pensée et la Langue, par l'importance de son ambition systématique, marque un moment important, souvent masqué, du développement de la linguistique au 20e s.; mais les faiblesses de la réalisation permettent aussi de mieux comprendre les handicaps qui ont pesé sur la linguistique française. Pourtant ce projet novateur, qui privilégie le rôle des relations sémantiques, a entraîné des réflexions pénétrantes sur des problèmes aujourd'hui centraux en linguistique: la place de la "définition" (à quel niveau doit-elle intervenir?); le rôle des modalités dans l'organisation syntaxique; l'articulation de la diachronie et de la synchronie dans un système explicatif, etc.
Parties du discoursComme le montre son organisation générale, l'ouvrage est bâti sur des notions, et non sur les parties du discours traditionnellement reconnues, que F. Brunot refuse catégoriquement. Il n'en reste pas moins qu'il recourt souvent aux classes de mots habituellement utilisées.
Innovations term.Un renouvellement assez sensible de la nomenclature est proposé et justifié (par ex. "représentant" pour "pronom").
Corpus illustratifTrès nombreux exemples, le plus souvent littéraires.
Indications compl.Intérêt pédagogique: on appréciera la part que cette théorisation linguistique a prise dans le renouvellement des méthodes pédagogiques. Fortement lié aux mouvements pédagogiques suisses, F. Brunot, dans son livre, a noué des traits essentiels d'une pédagogie de la créativité avec des interprétations idéologiques qui suivaient des chemins voisins depuis le siècle des Lumières. On peut seulement s'étonner que des domaines dont on s'attendait qu'ils fussent soulignés soient au contraire minorés, comme l'analyse des sons ou l'examen de la langue parlée.
Influence subieF. Brunot a toujours vanté la singularité de son entreprise qui est certes le résultat pédagogique de toute une vie. Il n'empêche qu'elle s'inscrit dans une tradition de deux siècles d'interprétation sémantique.
Influence exercéeElle est plus difficile à cerner. Les admirateurs les plus enthousiastes ont encore été les pédagogues, certains pédagogues du moins, car l'ensemble du corps enseignant était aveuglé par les grillages imposés par l'analyse grammaticale et l'analyse logique obligatoires depuis la création des lycées (1802). Quant aux linguistes, ils attendaient de tout renouveau des traits structuralistes qui n'étaient pas le fait de F. Brunot. La nouveauté de son œuvre se situait à un niveau plus profond d'analyse, même si Brunot n'en maîtrisait pas tous les aspects. Elle se situait, du moins, dans une ligne sémantico-pragmatique qui a été fort exploitée ces vingt dernières années, mais il lui manquait, pour être exploitable à ce niveau même, un appareil plus délibérément formel. La Pensée et la Langue est l'exemple remarquable d'un livre novateur, mais incompris et qui risque de le rester.
Renvois bibliographiquesChevalier J.-C. 1991 {bibliographie, p. 108-114}; Chevalier J.-C. & Verhagen P. C. 2009
Rédacteur

Chevalier, Jean-Claude

Création ou mise à jour1998