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Sēfer Ṣaḥōṯ

Ibn ‘Ezrā, ’Avrāhām ben Mē’īr

DomaineTraditions non-occidentales
SecteurGrammaires de l'hébreu [4204]
Auteur(s)

Ibn ‘Ezrā, ’Avrāhām ben Mē’īr

Datation: ca 1089-1164

Grammairien de l'hébreu, né à Tudèle, où il vécut jusqu'en 1140. Cette première partie de son existence est mal connue, de même que la raison exacte pour laquelle il a définitivement quitté l'Espagne et entamé un périple européen (Italie, Provence, nord-ouest de la France et jusqu'à Londres). C'est au cours de cette vie errante et économiquement peu assurée qu'il a rédigé la plupart de ses ouvrages, ce qui explique leur brièveté. Poète, philosophe, commentateur de la Bible, féru de mathématiques, auteur d'un traité d'astronomie, il laisse quatre grammaires hébraïques et un ouvrage de terminologie grammaticale.

Titre de l'ouvrageSēfer Ṣaḥōṯ baddiqdūq šeḥibbēr heḥāḵām haggāḏōl Rabbī ’Avrāhām ben Mē’īr hassĕfāraddī, hammĕḵūneh ben ‘Ezrāe
Titre traduitLe livre de la pureté grammaticale, composé par le grand savant Avraham ben Me’ir l'Espagnol, dit ben ‘Ezrā
Titre courtSēfer Ṣaḥōṯ
Remarques sur le titre
Période|12e s.|
Type de l'ouvrageGrammaire descriptive (essentiellement morphologique) de l'hébreu biblique.
Type indexéGrammaire descriptive | Traité de morphologie
Édition originaleComposée en 1145; éd. princeps en 1546 à Venise (Daniel Bomberg).
Édition utiliséeEd. princeps.
VolumétrieIn-12. L'ouvrage occupe les feuillets 133r à 194v d'un volume intitulé Diqdūqīm ("Grammaires") dans lequel Elie Lévita a réuni quatre grammaires hébraïques des 12e et 13e s.124 pages, 1 225 signes par page.
Nombre de signes150000
Reproduction moderneValle Rodriguez, C. del, Sefer Ṣaḥōṯ de Abraham Ibn ‘Ezra, edición crítica y versión castellana, Salamanca, 1977.
DiffusionUne vingtaine de manuscrits (certains incomplets) entre le 13e et le 18e s.; trois éditions (Venise, 1546; Berlin, 1768; Fürth, 1827); une éd. moderne avec traduction en espagnol.
Langues ciblesHébreu (biblique)
MétalangueHébreu (médiéval)
Langue des exemples
Sommaire de l'ouvragePremière partie (f. 134r-140r): description des sons vocaliques et des règles de la vocalisation massorétique. Deuxième partie (140v-142v): schèmes nominaux et verbaux. Différents types de mètres en poésie hébraïque. Troisième partie (142v-157v): les consonnes (dans l'ordre alphabétique): point d'articulation, nature (radicale ou servile), comportement phonétique (pour les consonnes faibles), fonction des lettres serviles [= consonnes pouvant fonctionner comme constituants morphologiques divers]: les aspects morphologiques et syntaxiques sont traités en même temps, à partir de chaque consonne [en effet, de nombreux affixes, morphèmes flexionnels, prépositions sont composés d'une seule lettre]. Quatrième partie (157v-191r): les parties du discours. Particules (158r-159v), noms (159v-166v), verbes (description morphologique, 166v-191r). Cinquième partie (191r-194v): changements de voyelles et problèmes exégétiques divers que la grammaire peut résoudre.
Objectif de l'auteurRéorganiser les fondements de la grammaire et la présentation des paradigmes, en réunissant en un ouvrage unique des données jusqu'alors dispersées. Son intention est avant tout pédagogique: il ne prétend pas à une quelconque originalité théorique.
Intérêt généralIbn ‘Ezrā est avant tout un transmetteur. En rédigeant sa grammaire en hébreu, il rend possible la diffusion en Europe (Provence, Nord de la France, Italie) des théories grammaticales de Ḥayyūğ et Ibn Ğanāḥ, jusque là inaccessibles puisque rédigées en arabe. Il présente également pour l'historien des théories linguistiques l'intérêt de citer des ouvrages aujourd'hui perdus.
Parties du discoursIl correspond au traitement arabe en trois parties (particule, nom, verbe). Les particules sont analysées du point de vue sémantique et syntaxique. Les noms sont répartis en trois classes: substantifs, dérivés, adjectifs. La partie sur le verbe est de loin la plus étendue (elle représente la moitié de la grammaire). Après une discussion approfondie sur la trilittéralité de la racine, l'auteur expose les différentes conjugaisons.
Innovations term.Très nombreuses, puisque l'auteur est l'un des premiers grammairiens à s'exprimer en hébreu. Quelques ex.: šem pō‘al ("infinitif", litt. "nom verbal") au lieu du maqōr de Mošeh Ibn Ğiqaṭilla, pour traduire le maædar arabe; sĕmīḵūṯ ("suffixe") au lieu de kinnūy (employé par Yōsēf Qimḥī); hannāḥ hanne‘elām ("la quiescente latente") préféré au noāḥ ne‘elām d'Ibn Ğiqaṭilla.
Corpus illustratifLes exemples sont tous puisés dans la Bible, à l'exception du chapitre consacré à la métrique.
Indications compl.Intérêt pédagogique: outre la description raisonnée des formes (mais sans donner des paradigmes complets), Ibn ‘Ezrā a le souci de fournir au lecteur des règles générales (kĕlālīm): par exemple, comment retrouver la racine d'un verbe comportant des consonnes faibles [parfois absentes dans la prononciation et / ou dans la graphie]. Autre originalité: la section sur le mètre hébreu. Selon Ibn ‘Ezrā, les formes linguistiques peuvent être classées de deux manières, "celle des grammairiens" (par schèmes) et "celle des poètes" (par nombre de syllabes). C'est la première grammaire hébraïque qui consacre un chapitre à la métrique.
Conception de la langue hébraïque: comme Sĕ‘adya Gā’ōn, Ibn ‘Ezrā introduit dans le titre de sa grammaire le terme de æaḥōṯ, qui correspond à l'arabe faæiḥ et signifie "clarté, pureté, élégance". La langue qu'il décrit correspond à un idéal linguistique, la langue de la Bible, pure de toute incorrection ou obscurité.
Influence subieIbn ‘Ezrā reprend les enseignements de Ḥayyūğ et Ibn Ğanāḥ (début du 11e s.) dont les travaux, rédigés en arabe, ont établi la structure trilittère de la racine hébraïque. Il les cite abondamment (en particulier le second d'entre eux). L'auteur le plus souvent mentionné est celui qu'il considère comme "le plus grand des grammairiens", Mošeh haKohen ibn Ğiqaṭilla (2 e moitié du 11e s.), premier traducteur en hébreu de Ḥayyūğ.
Influence exercéeL'ensemble de l'œuvre grammaticale d'Ibn ‘Ezrā – traductions de Ḥayyūğ et adaptations des théories d'Ibn Ğanāḥ – a profondément influencé le développement de la discipline. Bien qu'il n'ait aucune originalité théorique (ce qui lui sera reproché au début du 15e s. par Profiat Duran), il est considéré par ses nombreux successeurs comme le père de la grammaire hébraïque. Parmi eux, on citera en particulier Mošeh Qimḥī, qui s'inspire largement d'Ibn ‘Ezrā dans sa grammaire élémentaire (Mahălaḵ šĕvīlēy hadda‘aṯ); à son tour, cette dernière influencera les hébraïsants chrétiens du 16e s. Il n'est donc pas rare de trouver chez ceux-ci des références (généralement de seconde main) à "Rabbi Abraham Avenezra".
Renvois bibliographiquesBacher W. 1881; Bacher W. 1892; Hirschfeld H. 1926 {p. 71-76}; Prijs L. 1950; Roth C. & Wigoder G. (éd.) 1971 {vol. 16, col. 1352-1401}; Valle Rodríguez C. del 1976 {p. 275-281}; Valle Rodríguez C. del 1977; Van Bekkum W. J. 2009
Rédacteur

Kessler-Mesguich, Sophie

Création ou mise à jour2000