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Śabdānuśāsana

Hemacandra

DomaineTraditions non-occidentales
SecteurSanskrit, prakrits et pali: écoles non paninéennes [4336]
Auteur(s)

Hemacandra

Datation: 1089-1172

Grammairien indien originaire du Gujerat (Inde occidentale, village de Dhandhuka). Il entre très tôt dans les ordres jaïns (secte śvetāmbara). Devenu Maître en 1108, il se fait remarquer par son prosélytisme et convertit le roi du Gujerat. Polygraphe, auteur d'œuvres littéraires, grammaticales et lexicographiques. Si sa langue maternelle a vraisemblablement été le gujerati, ses langues de travail ont été uniquement le sanskrit et les différents prakrits.

Titre de l'ouvrageŚabdānuśāsana
Titre traduitEnseignement sur les mots
Titre courtŚabdānuśāsana
Remarques sur le titreVariante du titre: ou Siddhahemacandra [Siddha et Hemacandra] du nom du destinataire de l'ouvrage, le roi Jayasiṃha, surnommé Siddharāja, et de son auteur.
Période|12e s.|
Type de l'ouvrageGrammaire complète qui couvre et le sanskrit (chap. I-VII) et les prakrits (chap. VIII). La partie sanskrite constitue une élégante synthèse des connaissances grammaticales de l'époque et passe pour "la meilleure grammaire sanskrite du Moyen Age" (Kielhorn 1888, p. 264). Les règles sont rédigées, comme toujours en Inde, sous forme d'aphorismes (sūtra). Ouvrages complémentaires: un recueil de racines [Dhātupāṭha; Palsule 1961, p. 54-55], un traité sur le genre [Liṅgānuśāsana], une liste des uṇādi [Uṇādisūtra], une liste des classes [Gaṇapāṭha].
Type indexéGrammaire complète | Règles grammaticales
Édition originaleDate de composition: 1140 p.C. Première édition imprimée: pour la partie sanskrite, éd. publiée par la Nyāyaviśārada śrī Yaśovijaya Benares Jain Pāṭhśālā, Bénarès, 1905, 584 p.; pour la partie prakrite, Hemacandra's Grammatik der Prākritsprachen (Siddhahemacandram adhyāya VIII), Halle, 1877-1880 (réimpr. Osnabrück, 1969).
Édition utiliséePour la partie sanskrite, śrī Siddhahemacandra śabdānuśāsana of ācārya śrī Hemacandra Sūri. With the auto-commentary (Laghuvṛtti). Critically edited by Jaina Muni Jambuvijaya, Patan, 1994; pour la partie prakrite, Pischel 1880.
Volumétrie
Nombre de signes434744
Reproduction moderne
DiffusionManuscrits nombreux surtout dans l'ouest de l'Inde (Gujerat, Rajasthan). L'auteur de la grammaire a lui-même rédigé deux commentaires: un grand (Bṛhadvṛtti), qui n'est toujours pas édité intégralement et n'a été pris en compte qu'exceptionnellement (Belvalkar 1915, p. 78; Neumann 1935), bien qu'il soit de contenu assez riche, et un abrégé (Laghuvṛtti), qui ne retient du précédent que l'essentiel, mieux connu car il est généralement édité avec les aphorismes. On dispose aussi de sous-commentaires, parmi lesquels un Nyāsa sur le grand commentaire qui a l'avantage d'identifier les grammairiens qui ne s'y trouvent qu'indirectement mentionnés (Kielhorn 1886, p. 242 sq.). La grammaire sanskrite de Hemacandra a fait l'objet de réfections du type Kaumudī: ainsi, la Candraprabhā [Clair de Lune] de Meghavijaya (18e s. p.C.).
Langues ciblesGrammaire sanskrite: sanskrit. Grammaire prakrite: prakrits
MétalangueGrammaire sanskrite: sanskrit. Grammaire prakrite: sanskrit.
Langue des exemples
Sommaire de l'ouvrageHuit chapitres (adhyāya) comprenant chacun quatre quartiers (pāda).
– La grammaire sanskrite (chap. I-VII) contient un total de 3563 aphorismes: I. Métalangue, sandhi vocalique et consonantique, déclinaison (241 sūtra). II. Déclinaison, syntaxe des cas, règles de sandhi interne, substitution de consonnes, formation du féminin, forme des premiers termes de composé (460 sūtra). III. Préverbes, composition nominale, termes techniques relatifs à la conjugaison, emploi des désinences d'actif et de moyen, dérivation verbale (520 sūtra). IV. Substitutions et modifications diverses dans le verbe, affixation verbale (481 sūtra). V. Dérivation primaire, emploi de l'absolutif et de l'infinitif (498 sūtra). VI. Dérivation secondaire (691 sūtra). VII. Dérivation secondaire, suffixes utilisés en fin de composé, modification des bases devant les suffixes, règles interprétatives (672 sūtra).
– La grammaire prakrite (chap. VIII) contient un total de 1119 aphorismes répartis en quatre quartiers: 1. Phonétique des voyelles et des consonnes isolées (271 sūtra). 2. Phonétique des groupes de consonnes (218 sūtra). 3. Flexion des noms, des pronoms, des noms de nombre, des verbes (182 sūtra). 4. Substitution de racines, dialectes autres que le prakrit principal, soit, en l'occurrence, śaurasenī, māgadhī, paiśācī, cūlikāpaiśācī et apabhraṃśa (259 + 27 + 16 + 22 + 4 + 120 = 448 sūtra).
Objectif de l'auteurEcrire une grammaire pratique complète pour permettre l'apprentissage des six principales langues littéraires de son époque (le sanskrit et cinq dialectes prakrits) à de larges cercles, monastiques mais aussi laïcs. Ce projet est en rapport avec la situation historique: le premier destinataire de l'ouvrage est le souverain Jayasiṃha, patron de Hemacandra.
Intérêt généralPour le sanskrit, la grammaire de Hemacandra n'apporte guère de neuf, mais est un instrument appréciable qui mérite d'être pris en compte pour une évaluation correcte des techniques grammaticales indiennes et l'économie de la présentation. Pour le prakrit, Hemacandra, comme ses collègues, accorde une place de choix au prakrit principal (la māhārāṣṭrī), sans négliger pour autant les autres dialectes. Deux d'entre eux ont un traitement particulier: l'ārṣa, ou langue du canon jaïn aussi appelée ardhamāgadhī, ne fait pas l'objet d'une rubrique indépendante, mais ses spécificités par rapport au prakrit principal sont indiquées dans le commentaire au fil des aphorismes. La grammaire de l'apabhraṃśa est analysée intégralement, comme le serait une langue indépendante: phonétique, flexion nominale, formation du féminin, flexion pronominale, flexion verbale, indéclinables, formation des mots, irrégularités de genre. Par ailleurs, la section sur les substituts de racines (ādeśa) est une mine d'informations précieuse pour la connaissance du développement du vocabulaire indépendant du sanskrit.
Parties du discoursSeules la phonétique et la morphologie sont concernées par la grammaire. Parmi les innovations – ou les différences – avec Pāṇini, il faut relever l'analyse du verbe en neuf classes (au lieu de dix), les présents radicaux athématiques et athématiques à redoublement étant considérés comme appartenant au même groupe (Kirste 1895, p. 121).
Innovations term.Utilisation d'une terminologie simplifiée et plus directement compréhensible car elle se fonde sur l'étymologie du mot, et non sur le système des énoncés condensés. La plus grande partie en est empruntée au Kātantra, le reste vient de Śākaṭāyana. Comme dans beaucoup de grammaires non pāṇinéennes, les règles relatives au védique et à l'accentuation n'ont pas de place chez Hemacandra.
Corpus illustratifComme toujours dans les grammaires indiennes, le corpus illustratif est exclusivement du ressort du commentaire. En ce qui concerne le sanskrit, les exemples sont des mots isolés. Utiles sur le plan pédagogique, ils ne retiennent l'attention par aucun trait particulier. Pour le prakrit, la situation est différente, notamment dans le cas des dialectes ārṣa et apabhraṃśa où Hemacandra apporte des informations de première main que ne fournit aucun autre de ses collègues: les mots qu'il cite pour illustrer les règles particulières de l'ārṣa sont effectivement attestés dans les textes; les nombreuses strophes (dohā) qui émaillent la section sur l'apabhraṃśa, probablement des citations, ont une réelle valeur littéraire et sont probablement un reflet de la poésie populaire lyrique, héroïque et gnomique de l'époque. Elles fournissent un matériau inestimable pour la connaissance de l'apabhraṃśa et, vu leur difficulté, ont fait l'objet de maintes discussions (reprises dans Vyas 1982). Outre les illustrations présentes dans la grammaire elle-même, il faut signaler l'existence du Dvyāśrayakāvya [Poème à double point d'appui], épopée historique de Hemacandra dont les vingt premiers chants célèbrent le roi Siddharāja, tout en intégrant dans les strophes pratiquement tous les exemples de la grammaire sanskrite de l'auteur, et dont les huit derniers, en prakrit, célèbrent le roi Kumārapāla, tout en intégrant les exemples de la grammaire prakrite (Narang 1972, p. 134-152).
Indications compl.
Influence subieCompilateur de génie, Hemacandra fait son profit de toutes les sources disponibles. Si on a pu dire de la partie sanskrite de sa grammaire qu'elle constitue un remaniement simplifié de l'ouvrage de son prédécesseur jaïn, Śākaṭāyana, elle ne néglige pas pour autant les traités de Pāṇini (dont elle évoque le plan: huit chapitres divisés en quatre quartiers), Candragomin, ou Patañjali, ni non plus le Kātantra, le Jainendravyākaraṇa ou la Kāśikā, pour ne mentionner que les plus importants. En ce qui concerne le prakrit, bien que l'influence de Vararuci ne soit pas avouée, 96% des aphorismes relatifs au prakrit principal (la māhārāṣṭrī) se retrouvent chez Hemacandra (Nitti-Dolci 1938a, p. 155). Il faut aussi compter avec l'influence d'une source non disponible, que Hemacandra partage avec Namisādhu, le commentaire du traité de poétique (Kāvyālaṃkāra) de Rudraṭa (Nitt-Dolci 1938, p. 165 sq.).
Influence exercéeLes sectateurs de Hemacandra sont actifs jusqu'au 15e s. environ, mais l'influence de la partie sanskrite de l'ouvrage paraît avoir été limitée aux cercles jaïns de l'Inde occidentale. Pour le prakrit, le principal utilisateur de Hemacandra est Trivikrama, dont il fournit "une seconde édition", tout en apportant des "innovations" (Renou 1956, p. 129-132).
Renvois bibliographiquesBalbir N. 2009; Kielhorn L. F. 1969 {[1886-1888]}; Kielhorn L. F. 1969; Kirste J. O. 1993 {[1895]}; Narang S. P. 1972 {p. 134-152}; Neumann K. 1935; Nitti-Dolci L. 1938 {p. 147-177}; Pischel R. 1880; Renou L. 1956; Vyas K. B. 1982
Rédacteur

Balbir, Nalini

Création ou mise à jour2000