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Regole della lingua thoscana

Florio, Michelangelo

DomaineGrammaires des langues européennes modernes
SecteurGrammaires italiennes [3234]
Auteur(s)

Florio, Michelangelo

Datation: ca 1510-1572?

Écrivain, polémiste protestant et traducteur originaire de Sienne. Né de parents catholiques (dont certains ascendants étaient des juifs convertis), Florio entre d'abord dans l'ordre franciscain. Vers 1541, il abjure la foi catholique et s'engage en faveur de la Réforme dans diverses villes d'Italie (Faenza, Rome, Naples, Padoue et Venise). Son prosélytisme lui vaut d'être emprisonné 27 mois à Rome dans les prisons du pape Paul III (jusqu'aux premiers jours de mai 1550). Cette expérience traumatisante fait de lui un critique féroce de la Papauté (comme le montrent de nombreux exemples de la grammaire). Quelques mois après sa libération, il émigre, via la France, en Angleterre. À Londres, où il séjourne de nov. 1550 à mars 1554, il est bientôt nommé prédicateur de la communauté des protestants italiens, de plus en plus nombreux – parmi lesquels son compatriote, Bernardino Ochino (Sienne 1487-Slavkov/Austerlitz 1564), arrivé dès 1547 et actif à Canterbury, lui aussi ancien franciscain, devenu capucin et général de l'ordre (1538-1542), puis, après sa conversion, pasteur de la communauté italienne protestante à Genève de 1542 à 1545, et un autre Toscan, Pietro Vermigli (Florence 1500-Zurich 1562), qui enseigne alors à Oxford (après Strasbourg). Ses prêches enflammés contre le pape découragent quatorze de ses ouailles, qui retournent à l'église. Révoqué de sa charge pour une affaire de mœurs, Florio survit comme enseignant d'italien auprès de la «reine de neuf jours», Jane Grey, destituée sitôt désignée, à qui il dédie l'un des deux manuscrits de sa grammaire, et devient peut-être répétiteur de la princesse Élisabeth – à qui, devenue reine d'Angleterre, il dédie le 12 mars 1563, depuis «Soy de la Rhetia», sa traduction italienne du De re metallica (Bâle, 1556) d'Agricola, considéré comme l'un des fondateurs de la métallurgie et de la géologie. En 1553, naît son fils, Giovanni, auteur (de retour vers 1575 en Angleterre) des célèbres First fruites (1578), puis d'A World of wordes (1598), dictionnaire italien-anglais, ainsi que traducteur en anglais des Essais de Montaigne (1603). À la différence de Citolini, Florio a pu rentrer dans une terre «ove il si suona»: en février 1554, un édit ordonnant à tous les étrangers de quitter le pays dans les 24 jours, Florio abandonne définitivement l'Angleterre début mars avec sa petite famille et après une halte à Strasbourg, il finit, à l'invitation des autorités grisonnes («chiamato da questi signori Grigioni»), en mai 1555, par s'établir comme pasteur à Soglio, dans la Val Bregaglia, non loin de Chiavenna. En 1557, il publie sous son seul prénom – avec la mention «Stampata in Chamogascko (aujourd'hui Chamues-ch en Haute-Engadine) per M. Stefano de Giorgio Catani d'Agnedina» (anagramme d'Engadina), p. 87v – l'Apologia de M. Michel agnolo Fiorentino, ne la quale si tratta de la vera e falsa chiesa, en réponse à une lettre du frère franciscain Bernardino Spada, prédicateur à Bormio, qui l'accusait violemment d'être juif et de n'avoir rien compris à certains problèmes religieux. Cette apologie est une source précieuse d'informations sur la vie de l'auteur. Florio, qui occupe aussi la charge de notaire à Soglio entre 1564 et 1566, rédige alors un hommage à sa royale élève d'autrefois, Historia de la vita e de la morte de l'Illustr. Signora Giovanna Graia, già Regina eletta e pubblicata d'Inghilterra; e de le cose accadute in quel regno dopo la morte del Re Edoardo VI, témoignage de première main sur l'Angleterre de l'époque, dans la période troublée de la succession d'Edouard VI. Comme son voisin Castelvetro, et presque la même année, Florio a fini sa vie consolé par le spectacle des Alpes rhétiques (il est inhumé dans le petit cimetière de l'église de Soglio).

Titre de l'ouvrageRegole della lingua thoscana
Titre traduitRègles de la langue toscane
Titre courtRegole della lingua thoscana
Remarques sur le titreÀ noter l'adjectif toscano pour définir la langue présentée, qui s'explique par les origines siennoises de Florio et sa fierté d'être toscan en son exil.
Période|16e s.|
Type de l'ouvrage
Type indexéGrammaire didactique | Grammaire descriptive
Édition originaleLa grammaire a été rédigée en Angleterre entre 1551 et 1553. Deux manuscrits conservés, l'un à Londres au British Museum (Sloane 3011), l'autre à la bibliothèque de l'Université de Cambridge (Dd.XI.46), choisi par Pellegrini, car plus soigné et un peu plus développé.
Édition utiliséeTexte édité par Giuliano Pellegrini, dans «Michelangelo Florio e le sue “Regole della lingua thoscana”», Studi di filologia italiana 12 (1954), p. 104-201.
Volumétrie98 pages.
Nombre de signes180000
Reproduction moderneLe texte a été édité par Giuliano Pellegrini, dans «Michelangelo Florio e le sue “Regole della lingua thoscana”», Studi di filologia italiana 12 (1954), p. 104-201.
DiffusionRestreinte.
Langues ciblesItalien (toscan)
MétalangueItalien (toscan)
Langue des exemplesItalien (toscan)
Sommaire de l'ouvragePréambule (f. 4-8). La grammaire proprement dite est divisée en 28 considérations numérotées, portant chacune un titre: Des articles des noms (8v-21v) – Des articles du nombre du plus desdits noms, et du genre féminin (12v-14v), Des marques de cas (14v-21v). Des noms (21v-45v) – Des noms de genre masculin (21v-23v), Des noms féminins (23v-25), Des noms adjectifs (25-27), Des degrés de la comparaison (27-28v), Comment à la fin des noms et des verbes on laisse tomber la voyelle (28v-32v), De la construction de cet adjectif hic et haec, omnis etc. (32v-35v), Du pronom relatif quis etc. (35v-40), Des composés de ce relatif (40-42), De ce nom talis, tale (42-43v), Du nom adjectif tantus et quantus (43v-45v). Du pronom ego (45v-47v), Du pronom tu (47v-49), Des pronoms se, voi, noi (49-52), Des significations de ces particules vi, ci, ce (52-55), Du pronom ille, illa (55-59v), Du nombre du plus des formes susdites (59v-63v), Du pronom iste, ista et de la particule cio (63v-67), Du pronom ipse, ipsa et autres formes (67-70v), Comment on emploie le génitif de nombreux pronoms (70v-73). Des verbes (73-103) – Des modes impératif, optatif, subjonctif, infinitif (83v-89v), Des verbes passifs, impersonnels, participes, et gérondifs (90-93), Des verbes qui échappent aux règles par plusieurs de leurs formes (93-98), De la construction du verbe habeo, et sum, es, etc. (98-103). Des adverbes, prépositions et conjonctions de la langue toscane (103-124). Envoi (124-v).
Objectif de l'auteurEnseigner la langue toscane à son élève, la reine de neuf jours, Jane Grey: «de toutes ses parties, ses règles et sa structure, vous énoncer juste ce qu'il faut pour l'entendre, la posséder, la parler, l'écrire et reconnaître que c'est la plus parfaite de toutes les langues vulgaires» (8: «ecco ch'io ne vengo à dichiararvi d'ogni sua parte, regola, e ordine quanto vi basterà per intenderla, possederla, parlarla, scriverla, e conoscerla lingua perfettissima sopra tutte le volgari»). C'est la première fois que l'on trouve ainsi énumérées les quatre compétences usuelles de communication: comprendre, lire, parler et écrire.
Intérêt généralLa grammaire de Florio doit être la première grammaire italienne rédigée à l'étranger pour des non-italophones, pour ainsi dire la première grammaire connue d'italien langue étrangère. Le dictionnaire des mots invariables qui constitue le dernier chapitre innove en combinant d'une manière très originale (sans équivalent dans les autres grammaires) le principe alphabétique (déjà présent chez Tani) au principe analogique. Contrairement à ce qu'annonce le titre, n'y sont donc pas présentés seulement des adverbes, des prépositions ou des conjonctions. Ainsi: «Dicovi dunque che le seguenti voci in quella son' molto in uso, cio è Abada […] Da questo adverbio la lingua nostra ha formato un' verbo, cio è Bado, Badare che è della prima coniugazione» (103v), «A tutte hore è quello che in latino si dice Sepe, sepius; che in thoscano ancora si dice Sovente, Soventemente, Spesse volte, Spesso, e spesso spesso» (108v) ou bien «Al di dietro, Allo 'ndietro, e in dietro significano movimento di corpo contrario, come dire Tu cammini allo 'ndietro, cio è Retrograderis overo dirassi Tu ti sei voltato in dietro, cio è Retrorsum conversus es. questo stesso da Thoscani s'è detto à Ritroso, onde si chiamera ancora una persona Ritrosa che si contrapone alle dimande fattegli. E ancora dirassi Via ritrosa cio è torta, e che conduce à contrario cammino» (104v-105). Outre des exemples d'emploi, Florio fournit pour chaque entrée soit des équivalents ou des synonymes toscans (a tutte hore = sovente, soventemente, spesse volte, spesso), y compris à distance grâce à des renvois explicites (A lato è voce che parimente significa quello che à canto, cio è Penes, et Comparate: 105), soit des dérivés ou des mots appartenant à la même famille lexicale (abada = badare), passant ainsi d'une partie du discours à l'autre. Utilisé avant tout pour aider les anglophones latinistes à qui la grammaire s'adresse et leur faciliter la compréhension du texte, le latin sert parfois de nouveau point de départ pour revenir au toscan, en donnant un nouveau mot issu de la traduction (latine) et sémantiquement voisin de l'entrée (toscane): allo 'ndietro = retrorsum = a ritroso = ritroso. L'adverbe latin retrorsum, qui traduit la locution adverbiale toscane standard allo 'ndietro (< a + lo + in + dietro < latin tardif dē rĕtro), a deux continuateurs, l'un littéral dans une autre locution adverbiale (composée), synonyme mais plus rare, a ritroso, l'autre figuré dans l'adjectif ritroso ‘réticent’ ou ‘tortueux’. Le latin, ici, joue le rôle d'intermédiaire pour expliquer un adverbe de sens facile et d'usage courant du toscan de base (allo 'ndietro) en l'associant à un terme certes plus recherché de la langue à apprendre, mais issu directement du latin, (a) ritroso.
Parties du discoursSous l'influence de Fortunio et de Bembo, Florio traite surtout les parties du discours variables, considérées comme les plus importantes: articles et marques de cas, noms (y compris les adjectifs), pronoms, verbes, participes. Parmi les invariables, il distingue adverbes, prépositions et conjonctions et laisse de côté l'interjection. Le plan de la grammaire ressemble à celui de la première section des Avvertimenti de Tani, dont Florio a pu prendre connaissance en septembre 1550 à Venise, où il passe 17 jours, avant de prendre la route de l'exil pour l'Angleterre (via Milan, Lyon et Paris) le 18.
Innovations term.Peu nombreuses, mais intéressantes: construire ‘former un verbe (le construire morphologiquement)’ et construzzione ‘formation d'un verbe’, fallire ‘ne pas s'appliquer, faire exception (dit d'une règle)’, finizione ‘désinence’, (primiero/primo, secondo, terzo) grado ‘(premier, deuxième, troisième) degré (de l'adjectif)’, pratica ‘pratique (d'une langue)’, predicato ‘ce qui est dit du sujet, prédicat’, (verbo) prencipale ‘(verbe) principal’, sregolato ‘irrégulier’, sregolatamente ‘sans règle grammaticale’, virgola ‘accent’.
Corpus illustratifExclusivement des exemples forgés.
Indications compl.Sans doute par contraste avec l'anglais, Florio souligne dans sa langue l'emploi général de l'article avec les possessifs, y compris adjectifs (13v: il mio libro versus my book), et la place assez libre de l'adjectif par rapport au nom dans le groupe nominal (26v-27), alors que l'adjectif précède toujours le nom en anglais. Comme langue de référence et de contrôle, Florio recourt au latin (qui joue ainsi pleinement son rôle de langue internationale): le titre de certains chapitres laisse croire qu'on a affaire à une grammaire latine (voir ci-dessus les titres des chapitres sur les pronoms aux f. 32v-45v, ou bien Della construzzione del verbo "habeo", et "sum", "es", etc.).
Influence subiePlusieurs passages sont inspirés des Prose della Volgar lingua de Bembo (sens et usage de ciò, distinction de 4 classes verbales). Certaine aussi l'influence de la grammaire de Tani (système verbal et dénomination des temps, section terminale sur les «adverbes», conjonctions et interjections classés alphabétiquement, plan de la grammaire).
Influence exercéeNulle en Italie – vu que la grammaire de Florio est restée manuscrite en Angleterre, où Citolini semble en avoir eu connaissance (voir l'éloge de la langue italienne et de son orthographe dans la préface).
Renvois bibliographiquesPellegrini G. 1954; Perini G. 1997; Pizzoli L. 2004
Rédacteur

Vallance, Laurent

Création ou mise à jour2015-08