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Maupertuis, Pierre-Louis. Œuvres de Maupertuis. Tome premier – T04

[Réflexions philosophiques sur l'origine des langues]

Avertissement.

L'Écrit qu'on donne ici étoit demeuré
pendant quelques années dans
l'obscurité. La rareté des exemplaires,
dont on n'avoit imprimé qu'une douzaine
pour quelques amis, la difficulté de
la matière qu'il traite, enfin peut-être
sa juste valeur, l'avoient laissé presque
inconnu.

Lorsque le libraire Walther le fit
paroître l'année dernière dans un recueil
de mes Ouvrages, plusieurs lecteurs le
regardèrent comme quelque chose d'inintelligible ;
d'autres n'y virent que des
réflexions fort communes.

Entre ces deux extrémités, j'en aurais
laissé penser tout ce qu'on auroit voulu,
255si l'on ne m'eut fait lire le jugement
qu'en a porté un homme tout autrement
éclaire que ces Critiques. Mais si ce jugement
ne pouvoit m'être indiffèrent par
l'autorité de celui qui le portoit, il me
devenoit encore bien plus intéressant par
les soupçons qu'il faisoit naître.

M. Boindin, qui avoit sans doute vu
les réfléxions philosophiques sur l'origine
des Langues
, avant qu'elles fussent
publiques, & qu'on en connût l'Auteur,
avoit fait sur cet Ouvrage des remarques
fort obligeantes dans un sens, mais
que je me flatte qu'il n'auroit jamais
publiées. Ces remarques commencent ainsi.

Il ne faut pas demander de qui
est cet ouvrage ? La petitesse du volume,
la précision géométrique qui
256y règne, & les doutes métaphysiques
dont il est rempli, en décèlent assez
l'Auteur, & feroient soupçonner que
les recherches sur l'origine des Langues
n'en sont que le prétexte
.

Je ne me laisse point prendre par ce
début. Tout ce que dit M. Boindin
d'avantageux pour moi tourneroit contre,
si ce qu'il insinue ensuite étoit sondé.
Plus un ouvrage de cette nature auroit
de précision & de Géométrie, plus il
pourroit être pernicieux. Mais je me crois
si sur de détruire de tels soupçons, que je
ne crains point de remettre sous les yeux
du Lecteur les remarques de M. Boindin,
qu'on trouvera à la fin de cet écrit,
pourvu qu'on lise ensuite avec attention
ce que j'y réponds, ou ce que j'explique.257