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Henry, Victor. Antinomies linguistiques – T03

Préface

« L'application de la méthode pathologique à la psychologie, écrit
M.Th. Ribot 1, n'a pas besoin d'être légitimée ; elle a fait ses preuves. Les
résultats acquis sont trop nombreux et trop connus pour qu'il y ait besoin
de les énumérer. Cette méthode, en effet, a deux principaux avantages :
elle est un instrument de grossissement ; elle amplifie le phénomène
normal ; l'hallucination fait mieux comprendre l'image, et la suggestion
hypnotique éclaire la suggestion qui se rencontre dans la vie ordinaire ;
elle est un instrument précieux d'analyse… »

C'est sous le couvert de cette imposante autorité que je me permets de
placer les pages qu'on va lire. Étant admis d'après ces prémisses que le
langage créé par une glossolale doit reproduire et nous permettre de saisir
avec la netteté qui résulte de l'observation directe les procédés
inconscients et subconscients du langage normal, quel était le meilleur
moyen de tirer parti des documents linguistiques consignés dans le
curieux ouvrage de M. Flournoy ?

J'aurais pu, évidemment, ne donner aucune place à l'hypothèse, écarter
d'emblée tous les mots d'étymologie obscure ou douteuse, me taire partout
où je n'avais pas le droit d'affirmer, me borner, en un mot, à mettre en relief
les rapprochements frappants et sûrs entre le martien et telle ou telle autre
langue réellement existante. Mais, outre qu'alors mon étude eût été presque
inutile, puisqu'elle n'aurait rien contenu que tout lecteur de M. Flournoy
n'eût pu remarquer de lui-même avec un peu d'attention, elle aurait mérité
par ailleurs le reproche d'insincérité ; incomplète tout au moins, elle n'eût
pas été concluante. Une langue, quelle qu'elle soit, est un ensemble : on ne
l'explique pas en en détachant quelques mots faciles et jetant tous les autres
aux gémonies ; il faut, surtout en matière aussi délicate et inexplorée, que la
donnée certaine et la conjecture s'entrelacent, s'étaient et se contrôlent perpétuellement
l'une l'autre, et je dirais volontiers que la première est sans
valeur si la seconde ne lui sert de correctif et de repoussoir. De même donc
que M. Flournoy nous a donné intégralement, sans choix, les quarante
phrases martiennes qu'il a recueillies de la bouche de Mlle Smith, de même
et comme lui, je me suis cru autorisé, — je dis plus, — obligé, du moment que
je tentais l'entreprise, à passer au crible, sans exception ni réserve, les 300
mots dont ces phrases m'avaient permis de dresser le répertoire.77

J'y ai été encouragé surtout par l'accueil qu'il a fait à mes premiers
essais d'interprétation, quand je les lui ai communiqués à titre privé ; car
je ne m'aventurais pas sans hésitation sur un terrain si nouveau pour moi
et pour tout le monde. Je ne saurais assez dire la franche cordialité, la
confraternelle estime et la bonne grâce que m'a témoignées dès l'abord
l'éminent psychologue, soit qu'il me donnât à entendre que telle de mes
analyses linguistiques confirmait une de ses thèses favorites sur la pensée
et le rêve, soit qu'il me fournit, libéralement et sans compter, les
informations de fait sur le cas de Mlle Smith. Quelques-unes de celles-ci
ont trouvé place dans des notes complémentaires à la fin du volume.
Quant aux conclusions qu'il a pu éventuellement tirer de mes inductions
ou certaines ou hypothétiques, je lui laisserai le soin de les formuler, et
ainsi chacun de nous demeurera dans son rôle.

Ce ne sont pas là les seules obligations que j'ai à M. Flournoy. Il a
bien voulu, pour la commodité de mes lecteurs, m'autoriser à reproduire
en tête de mon livre les 40 phrases martiennes consignées dans le sien,
pp. 204-223. Les voici, dans leur ordre chronologique, avec la traduction
donnée par le sujet, et les indications accessoires qui permettront d'en
apprécier la valeur respective.

1. Métiche C. Médache C. Métaganiche S. Kin'tche.

Monsieur C. Madame C. Mademoiselle S. Quatre.

(Vocal, 2 février 1896.)

2. Dodé né ci haudan té mess métiche Astané ké dé
mé véche.

Ceci est la maison du grand homme Astané que tu
as vu.

(Auditif, vers le 20 septembre 1896, traduit le 2 novembre.)

3. Modé iné, cé di cévouitche ni êvé ché kiné Liné.

Mère adorée, je te reconnais et suis ton petit Linet.

(Vocal, 8 novembre 1896, traduit même jour.)

4. I modé, mété modé, modé iné, palette is ché
pétiché, ché chiré né ci ten ti vi.

O mère, tendre mère, mère bien-aimée, calme tout ton
souci, ton fils est près de toi.

(Vocal, 29 novembre 1896, traduit même jour.)

5. I kiché ten ti si ké di êvé dé étéche,
mêné izé bénézée ?

Oh ! pourquoi près de moi ne te tiens-tu toujours,
amie enfin retrouvée ?

(Auditif, 4 décembre 1896, traduit 13 décembre.)78

6. Ti iche cêné Éspênié ni ti êzi atèv As-
tané, êzi érié vizé é vi… I
, etc.

De notre belle « Espênié » et de mon être As-
(le reste tané, mon âme descend à
toi… Oh ! etc. comme en 5.)

7. Cé êvé plêva ti di bénéz éssat riz tês midée
durée ; cé ténassé viz iche Éspênié vétéche ié ché
atêv hêné ni pové ten ti si ; éni zée métiché oné
gudé ni zée darié grêvé.

Je suis chagrin de te retrouver vivant sur cette laide
terre ; je voudrais sur notre « Espênié » voir tout ton
être s'élever et rester près de moi ; ici les hommes sont
bons et les cœurs larges.

(Auditif, 15 décembre 1896, traduit 17 janvier 1897.)

8. Amès mis tensée ladé si, amès ten tivé avé
men, koumé ié ché pélésse ; amès somé têsé misaïmé,
ké dé surès pit chàmi, izà méta ii borêsé ti fi-
naïmé… Izà ii, dé séïmiré !

Viens un instant vers moi, viens près d'un vieil
ami, foudre tout ton chagrin ; viens admirer ces fleurs,
que tu crois sans parfum, mais pourtant si pleines de sen-
teurs… Mais si, tu comprendras !

(Auditif et vocal, 31 janvier 1897, traduit même jour.)

9. Ané éni ké éréduté cé ilassuné té imà ni
bétiné chée durée.

C'est ici que solitaire je m'approche du ciel et
regarde la terre.

(Auditif, 24 février 1897, trad. 14 mars.)

10. Simandini, lé làmi, mêné ! Kizé pavi ! kiz
atimi !

Simandini, me voici, amie ! Quelle joie ! quel
bonheur !

(Auditif, 14 mars 1897, traduit même jour.)

11. I modé, duméïné modé, kêvi cé mache povini
poénêzé mùné é vi, saliné éziné mimà Nikaïné
modé. -I men !

O mère, ancienne mère, quand je peux arriver
quelques instants vers toi, j'oublie mes parents Nikaïné,
mère. — O ami !

(Vocal, 14 mars 1897, trad. m.j.)

12. Lassuné, ké nipuné ani ; tiz dé machir mirivé
79iche manir, sé dé évenir toué chi amiché zé
forimé ti viche tarviné.

Approche, ne crains pas ; bientôt tu pourras tracer
notre écriture, et tu posséderas dans tes mains les
marques de notre langage.

(Auditif, 23 mai 1897, trad. m.j.)

13. Adèl, ané sini yestad… I Astané, cé fimès !
Astané, mirà !

c'est vous O Astané, je meurs !
Astané, adieu !

(Vocal, même jour que 12.)

14. Eupié, zé pâlir né amé : arvà nini pédriné ;
évaï diviné làmée ine vinà té luné. — Pouzé,
men hantiné, êzi vraïni né touzé med vi ni ché
chiré Saïne. Ké zalizé téassé mianiné ni di
daziné ! — Eupiré ! — Pouzé !

Eupié, le temps est venu : Arvâ( ?) nous quitte :
sois heureux jusque au retour du jour. — Pouzé,
ami fidèle, mon désir est même pour toi et ton
fils Saïné. Que l'élément entier t'enveloppe et te
garde ! — Eupié ! — Pouzé !

(Auditif, 18 juin 1897, traduit 20 juin.)

15. Modé tatinée, cé ké mache radziré zé tarvini
va nini nini triménêni ii adzi. Cé zé séïmiré
vétiche. I modé inée, kévi bérimir-m- hed ? kévi
machiri cé di triné ti éstotiné ni bazée animina ?
I modé, cé méï adzi ilinée, i modé inée, cé ké lé
nazère ani ! Mirà, modé itatinée, mirà, mirà, mirà !

Mère chérie, je ne puis prononcer le langage
où nous nous comprenions si bien. Je le comprends
cependant. O mère adorée, quand reviendra-t-il ? quand
pourrai-je te parler de ma dernière et courte existence ?
O mère, je t'ai bien reconnue, ô mère adorée, je ne me
trompe pas ! Adieu, mère chérie, adieu, adieu, adieu !

(Auditif, 27 juin 1897, trad. même jour.)

16. Astané. Ésenàle. Pouzé. Mêné Simandini, mirà.

(Visuel et graphique, 21 août 1897 : mêné « amie », mirà « adieu », et
quatre noms propres.)

17. Taniré mis méch med mirivé éziné brimaξ ti
tès tensée. Azini dé améir mazi si somé iche
hazina tranéi. — Simandini, cé kié mache di pédriné
tès luné. Ké cé êvé diviné ! — Patrinéz kié nipuné
áni.
80

Prends un crayon pour tracer mes paroles de
cet instant. Alors tu viendras avec moi admirer notre
nouveau passage. — Simandini, je ne puis te quitter
ce jour. Que je suis heureux ! — Alors ne crains
pas.

(Graphique, 12 septembre 1897, trad. m.j.)

18. Modé tatinée, làmi mis mirà ti ché bigà kà
ébrinié sanà é vi. Idé di zé rénir, — zé mess métiche
kà é zé valini iminé ni z(é) grani sidiné.

Mère chérie, voici un adieu de ton enfant qui
pense tant à toi. On te le portera, — le grand homme
qui a le visage mince et le corps maigre.

(Auditif, puis graphique, 10 octobre 1897, trad. même jour.)

19. M(êné), cé kié mache di triné sandiné téri né
êzi vraïni ; zou réch ; mirâ milé piri mirâ !

Amie, je ne puis te parler longtemps comme est
mon désir ; plus tard ; adieu adieu !

(Graphique, puis auditif, 24 octobre 1897, deux mots non traduits.)

20. Siké, évaï diviné ! Zé niké crizi capri né
amé orié antéch é êzé carimi ni êzi érié é nié pavinée ;
hed lé sadri ; dé zé véchir tiziné. — Matêmi,
misaïmé kà lé umêz éssaté, arvâ ti éziné adâniξ,
amés tès uri, amès sandiné ten ti si ; évaï
divinée ! Romé, va né Siké ? —Atrizi, ten té
taméch épizi.

Siké, sois heureux ! Le petit oiseau noir est
venu frapper hier à ma fenêtre et mon âme a été joyeuse ;
il me chanta ; tu le verras demain. — Matêmi,
fleur qui me fais vivre, soleil de mes songes,
viens ce soir, viens longtemps près de moi ; sois
heureuse ! — Rome, où est Siké ? — Là-bas, près du
« taméche » rosé.

(Auditif, puis graphique, 28 novembre 1897, trad. m.j.)

21. Véchési têsée polluni, avé métiche ; é vi ti
bounié, séïmiré ni triné.

Voyons cette question, vieux homme ; à toi de
chercher, comprendre et parler.81

(Auditif, 15 janvier 1898, trad. 13 févier.)

22. Astané, cé amês é vi ; chée brimi messé téri
ché pocrimé lé…

Astané, je viens à toi ; ta sagesse grande comme
ton savoir me…

(Auditif, vers le 25 janvier 1898, trad. 13 février.)

23. Paniné, évaï kirimé : zé miza ami grini ; ké
chée émêche rès pazé ! — Pouzé, tès luné soumini,
arvà ii cen, zé primi ti ché chiré, kiz pavi
luné ! — Saîné, êzi chiré, izé linéï ! kizé pavi ! —
Êzi mané ni êzi modé… Tiziné, êzi chiré. —
Êzi mané, cé êvé adi anâ.

Paniné, sois prudent : le « miza » va soulever ; que
ta main se retire ! — Pouzé, ce jour riant,
Arva( ?) si beau, le revoir de ton fils, quel heureux
jour ! — Saïné, mon fils, enfin debout ! quelle joie ! —
Mon père et ma mère… — Demain, mon fils. —
Mon père, je suis bien maintenant.

(Auditif, 29 février 1898, trad. même jour.)

24. Saïné êzi chiré, iée êzé pavi, ché vinà ine
ruzzi ti nini né mis mess, assilê atimi…
itéche furimir… nori.

Saïné mon fils, toute ma joie, ton retour au
milieu de nous est un grand, immense bonheur…
toujours aimera… jamais.

(Auditif, 11 mars 1898, trad. 21 août.)

25. Dé véchi ké ti éfi mervé éni.

Tu vois que de choses superbes ici.

(Auditif, 21 août 1898, trad. même jour.)

26. Astané né zé ten ti vi.

Astané est là près de toi.

(Visuel, 21 août 1898, tr. m.j.)

27. Siké, kiz crizi hantiné ! hed é ébrinié rès amêré
é nini, éssaté ti iche atimi. — Matêmi hantiné, hed
né hantiné, êzi darié. — Siké, tès ousti ké zé
badêni lassuné mazi trimazi, hed é ti zi mazêté é povinée
é nini ; zé priàni é fouminé ivraïni ; idé é ti zi
mazêté é vizêné zé chodé.

Siké, quel oiseau fidèle ! il a pensé se réunir
à nous, vivre de notre bonheur. — Matêmi fidèle, il
est fidèle, mon cœur. — Siké, ce bateau que le
vent approche avec force, il a de la peine à arriver
82à nous ; le flot est puissant aujourd'hui ; on a de la
peine à distinguer le « chodé ».

(Auditif, vers le 4 septembre 1898, traduit 16 octobre.)

28. Men mess Astané, cé amès é vi itêch li
tès alizé néümi, assilé, kà ianiné êzi
atèv ni lé tazié é vi med ieéξ éziné rabriξ, ni
tïbraξ. Men, amès di ouradé ké Matêmi uzénir
chée kida, ni ké chée brizi pi dézanir. Évaï
diviné tès luné.

Ami grand Astané, je viens à toi toujours par
cet élément mystérieux, immense, qui enveloppe mon
être et me lance à toi pour toutes mes pensées et
besoins. Ami, viens te souvenir que Matêmi attendra
ta faveur, et que ta sagesse lui répondra. Sois
heureux ce jour.

(Visuel, 3 octobre 1898, traduit 16 octobre.)

29. Saziné, kiché nipunêzé ? Dodé né pit léziré
bèz neura. Evaï dastrée : firêzi zé bodri né
dorimé, zé pastri tubré né tuzé.

Saziné, pourquoi craindre. Ceci est sans souffrance
ni danger. Sois paisible : certainement le os est
sain, le sang seul est malade.

(Auditif, 14 octobre 1898, traduit 16 octobre.)

30. Modé, ké hed oné chandêné, têsé mùné ten
ti vi ! — Bigâ, va bindié idé ti zàmé tensée ?
zou réche méd ché atèv kiz fouminé zati !

Mère, que ils sont délicieux, ces moments près
de toi ! — Enfant, où trouve on de meilleurs instants ?
plus tard pour ton être quel puissant souvenir !

(Auditif, 22 octobre 1898, traduit 18 décembre.)

31. Ràmié, bisti ti Éspênié, ché dimé ùni
zi trimazi tié vadâzaξ, di anizié bana mirâξ. Ramié
di trinir tié toumaξ, ti bé animinà ni tiche di
uzir nâmi ti Éspênié. Évaï divinée.

Ramié, habitant de « Éspênié », ton semblable par
la force des « vadâzas », te envoie trois adieux. Ramié
te parlera des charmes de sa existence et bientôt te
dira beaucoup de « Éspênié ». Sois heureuse.83

(Graphique, 27 octobre 1898, trad. 18 décembre.)

32. Anà évaï maniké é bétiné mis
tié attanâ kâ di médinié. Bétinié tès tapié ni
bée atèv kavivé. Danda anâ.

Maintenant sois attentive à regarder un
des mondes qui te entourent. Regarde ce « tapié » et
ses êtres étranges. Silence maintenant.

(Auditif, 2 novembre 1898, trad. 18 décembre.)

33. Sirima nêbé vinià ti mis métiche ivré toué
viniâ ti misé bigâ azâni maprinié imizi kramâ
ziné viniâ ti mis zaki datrinié tuzé vâmé gâmié.

Rameau vert nom de un homme sacré dans
nom de une enfant mal entré sous panier
bleu nom de un animal caché malade triste pleure.

(Phrase entendue d'abord en ultra-martien, puis traduite en martien
le 18 décembre 1898 2)

34. Ramié di pédrinié anâ, né écriné, diviné
té mùné ten ti vi. Hed dassinié mis abadà ti
ché atèv ni di parêzié banà mirâξ. Évaï divinée.

Ramié te quitte maintenant, est satisfait, heureux
du moment près de toi. Il garde un peu de
ton être et te laisse trois adieux. Sois heureuse.

(Graphique, 2 novembre 1898, trad. 18 décembre.)

35. Attanà zabiné, pi ten té iche ; tarvini
mabùré, nubé téri zée atèv. Astané, êzi dabé
fouminé ni ié ti takà, tubré né bibé ti zé
umêzé.

Monde arriéré, très près du nôtre ; langage
grossier, curieux comme les êtres. Astané, mon maître
puissant et tout de pouvoir, seul est capable de le
faire.

(Auditif, 5 décembre 1898, trad. 18 décembre.)

36. Aé aé aé aé lassunié, làmi Rêzé. Aé aé
aé aé niké Bulié. Va né Ozàmié ? Zitêni.
Primêni. Ozâmié viniâ ti mis bigâ kémà. Zitêni
viniâ ti misé bigâ kêmisi. Primêni viniâ ti
misé bigâ kêmisi.

(Exclamations) approche, voici Rêzé. (Exclamations)
petit Bulié. Où est Ozâmié ? (Noms
84propres.) Ozâmié nom de un enfant mâle. Zitêni
nom de une enfant femelle. Primêni nom de
une enfant femelle.

(Auditif, 8 mars 1899, traduit 4 juin.)

37. Astané bounié zé buzi ti di triné nâmi ni
ti di umêzé séïmiré bi tarvini.

Astané cherche le moyen de te parler beaucoup et
de te faire comprendre son langage.

(Graphique, 24 mars 1899, traduit 4 juin.)

38. Fêdié, amès ; Ramié di uzénir tès luné :
amès, zé bona trinir.

Fêdié, viens ; Ramié te attendra ce jour :
viens, le frère parlera.

(Visuel, 30 mars 1899, traduit 4 juin.)

39. Ramié, pondé acàmi, andélir téri antéch
iri é vi anà. Riz vi banà miraξ,
ti Ramié ni Astané. Évaï divinée.

Ramié, savant astronome, apparaîtra comme hier
souvent à toi maintenant. Sur toi trois adieux
De Ramié et Astané. Sois heureuse.

(Graphique, 1er avril 1899, trad. 4 juin.)

40. Ramié, ébanà, dizênà, zivênié, ni bi
vraïni assilé né ten ti rès kalàmé. Astané,
êzi dabé, né zi med lé godané ni ankôné.
Evaï banâ zizazi divinée.

Ramié, lentement, profondément, étudie, et son
désir immense est près de se accomplir. Astané.
mon maître, est là pour me aider et réjouir.
Sois trois fois heureuse.

(Auditif, 4 juin 1899, trad. même jour 3).85

41. (Mots isolés.) — 42. Vinia ti mis métiché napié.
Vinia ti mis crizi ruka té atimi ziné napié.
Naké yin noka. Vinia ti missé médaché tiziné yin
baza kobié. Vinia ti missé varuba métiché té
vinia ti missé natra 4 ivré. Vinia ti missé médaché
yin baza kobénir. Niméké.

Nom de un homme mange.
Nom de un oiseau emblème du bonheur bleu mange.
Partir au repos. Nom de une dame demain au
lever tape. Nom de une divinité homme du
nom de un bâton sacré. Nom de une dame
au lever tapera. Bienheureux.

(Traduction en martien, aussi inintelligible que le n° 33, d'une
séquence ultra-martienne 5.)

43. Yizé tarvini kié machinéné rès umaté ; hed kié
mévêzi ani téri nini tié fourni raka
tié zôda ; napiri hed mézouti tié forimi
nubée tédora toué mis liza dénâpi yizé rabri.
Cé di y ani umêzir ipêné peunêzé misé, imazé ti
pastiné é ché vraïni, ni vati med kié ani di
navazé mouda é tès attana. Évaï divinée.

Leur langage ne peut se écrire : ils ne
ont pas comme nous des marques formant
des mots : cependant ils possèdent des marques
curieuses exprimant dans un cas nécessaire leur pensée.
Je te en ferai connaître quelques-unes, afin de
complaire à ton désir, et surtout pour ne pas te
arrêter davantage à ce monde. Sois heureuse.

(Auditif, renseignements fournis par Ramié sur l'ultra-martien :
23 avril 1900, traduit 27 mai).

44. (Hiéroglyphes ultra-martiens traduits en martien, et du martien en
français.)

Il suffit de jeter un coup d'œil sur ces derniers textes pour se
convaincre que la langue martienne est en voie de se pervertir et même de
se jargonner. Il était temps de la saisir, et elle était mûre pour l'examen.
86Quoi que Mlle Smith puisse désormais produire en ce genre, il est douteux
que la psychologie et la linguistique en tirent d'autres renseignements
utiles que ceux qu'on verra consignés ci-après, si toutefois je n'ai
failli moi-même à tirer de l'admirable documentation de M. Flournoy
toutes les conclusions qu'elle comporte et autorise.

Sceaux (Seine), le 3 mars 1901.
V. Henry.87

1. La Psychologie des Sentiments (Paris, Alcan, 1896), p. 62.

2. J'ai omis le texte ultra-martien, qui n'a rien à voir à mon étude et n'offre d'ailleurs
nul intérêt. — La traduction (?) en français a eu lieu le même jour.

3. Ce sont là, outre quelques mots isolés qu'on trouvera en leur lieu, les quarante textes
qu'a publiés M. Flournoy et qui font l'objet de la présente étude. Ceux qui suivent sont
inédits : je ne les ai pas compris dans mon examen, achevé avant qu'ils ne fussent
recueillis : mais, pour être complet, je les transcris ici avec son autorisation. Il m'a également
communiqué un petit vocabulaire et des hiéroglyphes ultra-martiens fort curieux,
mais étrangers à mon plan, non moins que la langue uranienne, dont Mlle Smith avait
annoncé la prochaine apparition, mais qui, à ma connaissance, gît encore dans les limbes
de son subconscient et ne paraît pas devoir en sortir.

4. Missé signifiant « une » c'est ici le premier et unique exemple d'un nom masculin en
français qui soit féminin en martien.

5. Le même jour, M. Flournoy a obtenu la traduction des deux mots laissés en blanc au
n° 19 : milé piri « vite encore ». Voir aux additions finales.